Madame la Présidente, chers collègues,
Je me dois d’être franc sur un sujet aussi important et délicat que celui-ci, qui va engager l’avenir de tout un territoire en termes de mobilités.
La configuration actuelle du périphérique nantais n’est pas des plus pertinente, ce n’est un secret pour personne. Des travaux sont parfois nécessaires à la marge pour y remettre de l’ordre, et nous n’y sommes pas opposés, ainsi que nous l’avons vu dans la délibération précédente.
Nous sommes par ailleurs sans aucune ambiguïté favorables aux projets de renforcement des transports collectifs et de liaisons cyclables associés à l’opération.
Je ne remets pas en doute non plus la sincérité du projet quand il dit vouloir apporter une cohérence là où il n’y en a pas, quand il dit vouloir fluidifier la congestion du trafic, d’autant plus pour limiter les nuisances sur les voies métropolitaines qui en subissent le report.
Quelques années en arrière ce projet aurait fait consensus et serait passé inaperçu. Mais la complexité et la multiplicité des enjeux de notre époque fait qu’aujourd’hui, un projet qui semble cohérent, peut très vite devenir incohérent.
Surtout lorsque celui-ci se heurte à de nouveaux impératifs vitaux pour notre société : celui de la lutte contre le réchauffement climatique, celui de la résilience de nos villes, celui de la lutte contre la pollution de l’air, véritable enjeu de santé publique. Sur tous ces défis notre rôle est aussi et peut être d’abord de construire de la cohérence.
Nous le savons, nous traversons actuellement une période cruciale pour l’avenir de nos territoires et de la planète, qui doit nous réinterroger toutes et tous sur chaque euro investi pour nos communes. Cela n’est pas facile, mais c’est nécessaire. Ce projet n’est pas compatible à terme avec la vision ambitieuse que nous portons pour notre territoire.
D’autant que la solution systématiquement apportée pour résoudre les problèmes de congestion, et qui consiste à augmenter les capacités routières, m’interroge. Si l’on y regarde bien, que se passe-t-il la plupart du temps ?
Et bien l’infrastructure finit par attirer un trafic supérieur à ce qu’avait prévu le modèle, de l’ordre de +10 à +20 %, ce qui à terme ne résout ni les problèmes de bouchons, ni les problèmes de report sur la voirie locale. Si l’on en croit l’Autorité Environnementale, pour ce tronçon routier le trafic devrait augmenter de +35% !
Ce phénomène est connu depuis les années 1960 et il porte un nom, celui de trafic induit. Serait-il possible à l’avenir de l’intégrer dans nos modèles ainsi que l’étude de variantes via les modes hors voiture ?
Mais, me direz-vous, et c’est justifié, l’étude d’impact a identifié un point d’accumulation d’accidents lié au ralentissement et à l’entrecroisement venant de la Beaujoire vers la porte de Rennes.
D’autres outils moins onéreux sont pourtant à notre disposition pour y pallier : signalisation dynamique, limitation de la vitesse (avec un effet immédiat sur la fluidité), ou encore le rabattement de la voie autoroutière sur une seule file pour faciliter l’insertion. La Direction Interdépartementale des Routes de l’Ouest sait réaliser ce type de mesures d’exploitation allant dans le sens de la sécurité et sans dépenser une fortune.
Je passe rapidement sur les 10 ha d’espaces naturels impactés dont la destruction de 4 ha de zones boisées et de 1 232 m² de zones humides. Ce sont des espaces naturels que nous ne retrouverons plus.
En cette période de redéfinition du sens de l’action publique, mais aussi de finances contraintes, il nous faut juger de ce qui est le plus essentiel. Cet argent serait bien plus utile pour nous aider à respecter nos engagements en matière de lutte contre le réchauffement climatique, en matière de qualité de vie, et en matière de santé publique.
Nous en avons besoin pour mettre en cohérence la politique de création de parcs relais pour que chaque automobiliste vienne chercher le transport collectif qui l’amène le plus facilement vers sa destination, ainsi que nous le faisons avec la liaison entre les trams 1 et 2 dont je salue l’avancement.
Nous en avons besoin pour répondre au déficit de transports en commun dans les communes éloignées du centre, notamment sur le sud Loire, en investissant dans des lignes de bus et en planifiant la création d’un train express du quotidien en emboitant le pas à Bordeaux, Strasbourg, Marseille et Grenoble. Les financements sont là, il faut les saisir.
Pour notre part nous voterons contre cette délibération. Non pas contre la recherche d’une solution à ce problème posé dès l’origine par une erreur de conception, mais contre la solution préconisée aujourd’hui en ce qu’elle ne tient pas compte des enjeux de réduction générale du trafic.
Mais il ne faut pas que cette différence de vision reste sans suite et j’appelle à ce que les assises de la mobilité durable que nous avons proposés pour ce début de mandat soit le moment pour mettre toutes ces questions à plat et mieux orienter les investissements.
Je vous remercie.